Smartphone dans la poche, nous voilà tous géolocalisables: une aubaine pour les applications mobiles de rencontres, comme l’américaine Tinder ou l’allemande Lovoo, qui misent sur la drague de proximité, plus ludique et pulsionnelle que les sites de rencontre traditionnels.
En un coup d’oeil, la sanction est immédiate. Le doigt rivé à l’écran de son téléphone, Marie envoie vers la gauche ou vers la droite les photos des célibataires inscrits sur Tinder à 2 kilomètres à la ronde. Gauche, s’il est écarté, droite, s’il lui plaît. En face, si le jugement est réciproque, l’application ouvre une fenêtre de tchat.
“Ludique et instantané”
Cette Parisienne de 32 ans, qui utilise depuis deux mois cette application gratuite, compte à son actif quatre rendez-vous “pour aller boire un verre et discuter”. “Je n’aime pas passer des heures à éplucher les profils sur les sites de rencontres. Au bout d’un moment, tu as l’impression que tout le monde se ressemble. Là, t’as le côté ludique et c’est instantané”, témoigne-t-elle.
Petit jeu addictif
“Très vite, tu vois si ça colle ou pas. Ca simplifie les étapes et il y a moins de pression”, ajoute Marie qui prévient que ce “petit jeu” rend “accro”: “ça amuse beaucoup les copines qui veulent ‘jouer à Tinder’. Tu peux passer un après-midi à faire ‘oui ou non’, juste pour jouer”.
Tinder et Lovoo
Lancé fin 2012 par un jeune Américain, Tinder, qui ne communique pas son nombre d’utilisateurs, aspire les informations de base (âge, ville de résidence, goûts et amis communs) depuis le compte Facebook de l’utilisateur lors de son inscription. “Sur internet, il fallait être patient pour rencontrer quelqu’un. Là, on est dans la spontanéité, dans l’immédiateté et ça correspond bien à cette génération qui veut tout, tout de suite”, estime Stéphane Boulissiere, responsable France de Lovoo, application allemande, dont la formule de base est également gratuite. Pour mettre l’accent sur la géolocalisation, Lovoo se présente sous la forme d’un radar qui situe les autres célibataires à la ronde. Il suffit de cliquer sur un des points colorés pour entamer une conversation.
“GPSisation de nos vies”
“Ces applications, qui s’inscrivent dans une +GPSisation+ de nos vies, ont un fonctionnement très malin. C’est un peu comme une loterie, elles nous mettent sous tension car on peut être sollicité à tout moment”, juge Pascal Lardellier, professeur de sciences de l’information qui a publié “Les réseaux du coeur. Sexe, amour et séduction sur internet”. “Il y a aussi un côté addictif. On a envie de regarder tout le temps, d’aller dans les quartiers où il y a du monde. C’est une forme de réhabilitation de l’instinct sexuel, de la pulsion: il faut être prêt à chaque instant”, ajoute-t-il à l’AFP. De passage dans une ville, dans son quartier et jusque dans le même immeuble, ces nouveaux outils de la drague numérique accélèrent le tempo de la rencontre. Ils fonctionnent sur le même principe de géolocalisation que Grindr, l’application à succès de la communauté gay.
“Gare à l’hyperconsommation”
“A la différence des sites de rencontre, on n’a pas le temps de vraiment se connaître en ligne. C’est un instrument qui aide à la prise de contact. Ça permet de décrocher un rendez-vous pour prendre un verre”, analyse le sociologue Jean-Claude Kaufmann, auteur du livre “Sex@amour” sur le bouleversement des rencontres amoureuses par internet. Mais gare à “l’hyperconsommation”, prévient-il, qui peut laisser des traces. “Internet permet de tisser des relations dans un certain confort car je peux débrancher n’importe quand, sans avoir à m’excuser. Mais ça peut être très mal vécu par celui qui est rejeté. C’est le prix à payer pour celui qui veut s’engager dans une relation plus durable: cet univers sans fin de relations possibles rend cet engagement encore plus difficile”.
Adopteunmec
Signe de l’engouement pour la géolocalisation, la nouvelle version de l’application mobile du site Adopteunmec, prévue au premier trimestre 2014, intégrera la fonction “autour de moi”.