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Un morguier déballe, « certains ministres sodomisaient les cadavres, et je leur vendais des organes »

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Depuis avril 2010, Didier Ovono, n’est plus responsable de la morgue de l’hôpital régional de Bertoua. Dans l’entretien qu’il nous a accordé le lundi 14 août 2013, cet ancien morguier fait des révélations sur son métier et les pratiques diaboliques qu’il a entretenues avec des ministres.  Témoignage émouvant d’un morguier de 40 ans, marié et père de trois enfants, depuis sa résidence à la frontière avec le Gabon.

Morguier-thierval

Comment êtes-vous devenu responsable de la morgue ?
J’ai d’abord exercé le métier de brancardier pendant cinq ans. C’est à l’issue de cette fonction que j’ai été recruté comme responsable de la morgue de l’hôpital régional de Bertoua, grâce à un ministre qui me connaissait comme un grand sorcier. J’ai aussi reçu une formation d’embaumeur de corps par celui que je remplaçais.

En quoi consistait votre travail ?
Un morguier est un employé de morgue, l’endroit où on conserve les cadavres. Notre travail consistait donc à conserver les morgues jusqu’à -2 degrés C. Nous nous occupions surtout des formalités administratives concernant la conservation et le  transfert des dépouilles mortuaires vers les maisons funèbres. Cependant, le morguier ne peut être confondu au croque-mort, on ne peut pas parler de croque-mort, dans une morgue hospitalière ou maison mortuaire  comme les gens le font. Le croque-mort est un employé de pompes funèbres, le service qui organise les funérailles d’un cadavre, de l’enlèvement du corps à la morgue, jusqu’à l’enterrement dans un cimetière. Laver, embaumer, embellir le cadavre, font également partie du travail du croque-mort. Au Cameroun, nous devons parler de morguier et non de croque-mort, comme les gens ne connaissent pas, ils confondent morguier et croque-mort, sans avoir totalement tort, car les deux métiers consistent en la manipulation de cadavres.

Ne vous arrivait-il pas de jouer au croque-mort ?
Cela m’arrivait souvent et ça ne me déplaisait pas de le faire. En de telles situations, j’avais l’impression de servir à quelque chose.

Les morguiers sont-ils vus comme des gens ordinaires dans notre société ?
Ce n’est pas tout à fait le cas. Les gens disent que j’ai des pouvoirs mystiques.  Les gens avaient peur de moi, au même titre que les cadavres.

Faisait-on de vous un cadavre avant l’heure ?
Non, les gens ne faisaient pas de moi un cadavre. Seulement, le fait que j’étais en permanence en contact avec les cadavres, faisait peur à mes semblables. On pensait que j’étais un surhomme.

Vous êtes marié et père de trois enfants. N’effrayiez-vous pas souvent votre petite famille par votre fonction ?
Je n’avais absolument pas de problème à ce niveau. Ma femme fréquentait régulièrement mon service et m’assistait souvent quand je travaillais sur mes rapports de fins de mois que je faisais la nuit. Peut-être avait-elle une part de mes, soit disant pouvoirs mystiques (rires).

La manipulation des cadavres parlez nous-en
Au début, j’avais des sueurs froides. Après je me suis rendu compte qu’il n’y  avait pas lieu d’avoir peur. On a souvent des sensations bizarres en manipulant des cadavres. Il y’a des corps qu’on manipule à l’aise. Par contre, il y en qu’on manipule et se sentir un peu mal en point.

Certaines personnes vous approchent pour se procurer des organes humains. Est-ce vrai ?
C’est vrai, cela m’est arrivé plusieurs fois. Je recevais la visite des ministres. Des directeurs généraux des sociétés privées et d’Etat. Ceux-ci quittaient Yaoundé pour Bertoua par ce qu’ils voulaient être discrets dans leurs manigances. Ils arrivaient à minuit eux-mêmes au volant de leurs voitures. Certains préféraient sodomiser les cadavres, selon la pratique qui leur était imposé dans le milieu occulte. D’autres qui n’étaient pas courageux, me payaient pour que j’aille livrer au bureau. Cela se passait toujours vers 23h-minuit.

J’étais sollicité par ce que j’entretenais bien le business. Pour des cadavres, je n’avais aucun remord à faire cela. Je pouvais gagner 500 000 par mois. La livraison dans les ministères ne concernait pas toujours les ministres il y’avait aussi des employés qui faisaient des pratiques pour accéder aux postes supérieurs.

Citez nous les ministères et les sociétés où vous faisiez des livraisons.
Je ne vous donnerai pas les noms des ministres (rires) par ce que je dois vous protéger. En ce qui me concerne, je n’ai peur de personne et ils me connaissent, ils ne peuvent pas m’atteindre. Beaucoup de ministres avec qui j’ai traités, sont encore en poste, d’autres en prison.

Lorsque je livrais les organes à ces gens, les points de rencontre étaient le (nom de l’hôtel enlevé Ndlr), et souvent (…). On me contactait une semaine avant, je recevais le numéro d’une chambre. Et lorsque j’arrivais à l’hôtel, je ne m’arrêtais pas à la réception. J’entrais directement dans la chambre et je déposais le colis qui était soit la langue, les dents, le cœur, ça dépendait de la pratique. J’étais payé par livraison 55 000 ou 100 000 FCFA. J’ai fait des livraisons à ……. Les ministères concernés étaient ……. (Camer.be omet volontairement de reprendre les noms des entreprises citées Ndlr)

Toutes les personnes qui demandaient à être livrées, voulaient accéder à un poste. Il y en a qui prenaient ces organes et mettaient dans leurs vêtements pendant un an, lorsqu’ils vont au travail. Je vous assure, je n’ai aucun respect pour certains ministres. Ce sont des monstres qui se cachent sous des vestes. Certains d’entre eux sont les plus accros aux pratiques bizarres.

Votre conscience est-elle tranquille  après avoir dépecé des dépouilles appartenant aux familles frappées par la tristesse ?
Pour dire vrai, je suis incapable de tuer quelqu’un et de vendre les organes. Vous savez, lorsque vous êtes mort, c’est fini, c’est terminé. Votre âme est partie. Ce corps qui reste là, avant d’aller pourrir sous la terre, peut être utile suivez mon regard.

Vous pensez à leurs familles ?
J’y pense mais je vous dis que c’est terminé. Un œuf sans son jaune et son blanc, à quoi sert-il ?  Vous pouvez me répondre ? Alors n’insistez pas, ce que je vous dis c’est comme cela.

Avez-vous parlé à un cadavre un jour ?
Oui, je pense que les cadavres entendent. Car, selon ce que je sais, les esprits ne sont jamais loin. Ce qui m’étonne c’est de voir côte à côte les cadavres de riches et de pauvres alors que dans la vie courante, il y’a souvent un fossé entre les deux. J’avais pensé que le temps mis à la morgue me mettrait au-dessus des autres. Mais un jour, après la perte d’un ami cher, je pleurais plus que tout le monde. Cela m’a fait comprendre bien des choses.

Tout travail mérite salaire. Comment les morguiers sont-ils rémunérés au Cameroun ?
Au Cameroun, il n’y a pas de grille salariale pour les morguiers. Mais ce sont des types qui vivent bien. Malheureusement c’est un métier mal vu par certaines personnes.  Il y’a une contrainte, nous travaillons beaucoup au regard de la particularité du métier. Nous n’avons pas encore une association, nous ne sommes pas nombreux sur le territoire.

Avez-vous un appel à lancer aux populations ?
Je voudrais dire aux Camerounais que les morgues leur appartiennent. Lorsqu’il y a généralement un décès, ce qu’il ne faut pas faire car il peut y avoir des problèmes de contagion. Si la personne est morte d’une maladie contagieuse. Je les invite à aller déposer leurs corps à la morgue où les conditions de conservation des cadavres sont réunies même si cela leur revient à 15 000 la journée.

Avec tout ce que vous venez de raconter les Camerounais vont-ils encore vous croire ?
J’ai raconté quoi ? (rires aux éclats)

Thièrval

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