Un spot publicitaire faisant l'éloge de l'éducation de la jeune fille dans le septentrion la présente comme un exemple à suivre. Youssouf Hadidja Alim, depuis son entrée au gouvernement en 2009 n'a pourtant cessé de briller par un attentisme qui frise l'immobilisme, mieux, pour reprendre une expression nationalement consacrée, l'inertie.
Le ministre de l'Education de base affiche un silence suspect face au vent de contestation des listes des enseignants contractualisés.
Son avènement au sein du gouvernement a certes été précédé du passage du célèbre rapace, qui, en un battement d'ailes, a emporté son prédécesseur, Haman Adama, et quelques-uns des collaborateurs de celle-ci. Ce lourd précédent rend l'actuelle ministre de l'Education de base (Minedub) prudente et méfiante à l'extrême. Sauf que la peur de mal faire finit par jouer des sales tours.
La campagne de recrutement des instituteurs à la Fonction publique le démontre à souhait. Le Minedub renvoie à l'opinion publique nationale et internationale l'image d'un manager dépassée par la tournure des évènements. Après la publication des premières listes, en octobre 2014, face à la fronde essuyée, elle a tôt fait de les annuler et de créer au pied levé une commission spéciale chargée de l'étude « au cas par cas » de tous les dossiers des maitres des parents, candidats à la contractualisation.
Résultat des courses, de nouvelles listes, de nouvelles contestations. Et comme de bien entendu, des marches de protestation et même un sit-in devant les services du Premier ministre, dispersé par la police. De fait, les listes affichées regorgent d'irrégularités et d'incongruités qui n'ont d'égales que les larmes des postulants.
Les manifestations et les articles de presse à ce sujet agissent curieusement sur cette diplômée de l'Enam comme l'eau sur les plumes d'un canard. Imperturbable, Youssouf Hadidja Alim ne se croit pas obligée d'organiser le moindre point de presse pour s'expliquer. La réponse, l'unique qu'on sert dans des bureaux du Minedub, se résume à ceci : « Circulez, n'y a rien à voir, attendez le prochain recrutement». Comme si les causes d'hier ne produiront pas les mêmes effets demain.
Même la mise en garde des partenaires financiers, qui menaçaient de se retirer du processus, en cas de fraude, ne semblent pas inquiéter l'ancienne sage-femme. Elle qui a pourtant fait toute la première phase de sa carrière dans le social, donne l'air de s'être bouchée les oreilles face aux cris des instituteurs, dont certains justifient de cinq ans d'exercice du métier sur le terrain, avec pour seul revenu, des broutilles payées par les parents.
Mentor
Présentée à tort ou à raison comme une « marafiste » de la première heure, Youssouf Hadidja Alim, qui ne justifie pas d'un passé particulièrement flamboyant en politique, arrive dans ce milieu en 1980. Après son mandat de conseillère municipale, obtenue à la suite des élections de 1987, à la commune urbaine de Garoua, puis celui de députée à l'Assemblée nationale en 2007, elle est coptée par son « mentor » pour remplacer « numériquement » Haman Adama, partie justifier de sa gestion au pénitencier de Kondengui, en 2009.
Son accointance et les antécédents de sa famille avec celle de l'ancien Minatd, font de cette veuve de pharmacien, et belle-sœur du capitaine Youssouf (exécuté après les évènements du 06 avril 1984), un contrepoids politique favorable, dans la Bénoué, véritable mare à caïmans.
Le Rdpc, où elle siège comme membre titulaire du comité central, se rend vite compte du vide laissé par Haman Adama, au point de proposer à cette dernière (libérée après restitution du corps du délit) l'animation de la campagne du parti au pouvoir dans ce département, malgré son casier judiciaire entaché, lors des municipales et législatives de 2013. Face au manque de puissance mobilisatrice de celle qui était censée la suppléer, en l'occurrence Youssouf Hadidja Alim.
La native de Bibémi, mère de sept enfants, a gardé cela en travers de la gorge. Sexagénaire, Mme Alim a fait ses armes à la tête du centre de promotion de la femme et de la famille de Garoua et de la délégation régionale de la promotion de la femme et de la famille du Nord, avant son élection à l'Assemblée nationale. Des fonctions où silence et discrétion lui ont probablement porté bonheur. Mais un poste de ministre n'a aucune commune mesure avec un poste de chef de service ou de directeur.